Le club de Cognac propose chaque année et pendant douze ans 10.000 euros d’aides aux jeunes. La suite d’une vente aux enchères de 300.000 euros en 2013.
Les candidatures ont été ouvertes lundi par le président Joël Bergeot et son équipe.
Ils pourront dire merci à Monsieur Gu. Depuis cette semaine, le Rotary propose aux jeunes de 18 à 30 ans d’obtenir une aide à projets plafonnée à 10.000 euros par an. Une somme remise sur le tapis du Rotary chaque année pendant douze ans. Soit 120.000 euros pour « les jeunes originaires de GrandCognac ou de Grande-Champagne et porteurs d’un projet innovant et créatif » (lire l’encadré).
Et cette somme de 120.000 euros, elle vient tout droit du très large portefeuille d’Albert Gu, mais aussi de quatre années de travail du Rotary pour créer la collection « Cognac Record ».
En juin 2013, l’investisseur chinois était venu de Shanghai pour acheter 300.000 euros les 1.008 bouteilles de cette collection unique au monde. Une vente aux enchères dont il était le seul acheteur et qui avait bénéficié du concours de 18 clubs charentais.
« C’est la plus grande collection de cognacs au monde, rappelle le président du Rotary, Joël Bergeot. Elle est homologuée par le Guiness des records depuis 2014. » Le précédent record de 367 bouteilles était détenu par un Canadien.
Une fois redistribuée dans chacun des Rotary participants – au prorata du nombre de bouteilles amenées par chacun – il restait au club de Cognac 120.000 euros à redistribuer (1).
S’inscrire dans la durée
Et plutôt que de les verser à des associations comme c’est souvent le cas, les 57 membres du Rotary cognaçais ont choisi de créer la bourse Concours Projets Avenir Jeunes, soit CPAJ (prononcez « cépage »).
« Plutôt que de mettre une somme plus importante chaque année, on a choisi d’inscrire cette action dans la durée, pendant une douzaine d’années », explique Francis Dutheil, le président de la commission chargée de mettre en place la bourse.
« C’est un bon coup de pouce », résume sobrement Jean-Marc Olivier, chargé de la communication du Rotary.
10.000 euros alloués à un ou plusieurs projets, c’est en effet une somme qui peut faire pâlir bien des collectivités soucieuses d’aider leurs jeunes.
« On n’a pas voulu restreindre les possibilités, la bourse est vraiment ouverte à tous les domaines, du sport à l’artisanat en passant par l’environnement ou la création d’une entreprise », insiste Francis Dutheil.
Reste maintenant à trouver des candidats. Pour y parvenir, le Rotary a fait éditer 500 plaquettes distribuées aussi bien dans les lycées, les banques que les collectivités. « Mais nous comptons aussi beaucoup sur internet et les réseaux sociaux pour faire connaître la bourse », espère Francis Dutheil.
Aux jeunes d’en profiter. Ils n’auront pas tous les jours moins de 30 ans. Ni une aide de 10.000 euros à décrocher grâce à un riche parrain chinois et à l’obstination de la famille cognaçaise du Rotary.
(1) 40.000 euros ont aussi été versés au Rotary international.
Comment obtenir la bourse CPAJ?
Chaque personne de 18 à 30 ans originaire de GrandCognac ou de Grande-Champagne peut retirer un dossier de candidature sur le site du Rotary (1) ou directement à l’adresse contact@rotary-cognac.org.
Pour cette première bourse, il va falloir faire vite: les dossiers doivent être déposés avant le 15 décembre.
Un jury recevra ensuite les présélectionnés avant le 15 février avant l’annonce de la décision, le 28 février.« Nous ne nous interdisons rien, poursuit Joël Bergeot. Nous pouvons récompenser plusieurs lauréats pour qui une somme de 2.000 ou 3.000 euros serait un vrai plus. Mais il peut aussi y avoir des années sans lauréat ».
Parmi les critères d’accession à la bourse CPAJ, le Rotary met en avant « la faisabilité » ou« l’impact local » du projet. Mais aussi son « utilité sociale » ou encore « l’originalité » de la démarche.
« Un jeune sportif qui veut se lancer et qui a besoin de matériel peut nous intéresser, tout comme un jeune créateur d’entreprise ou un artiste. Tout est ouvert », insiste Jean-Marc Olvier.
Réseaux sociaux : L’ancêtre des réseaux sociaux affronte la concurrence de LinkedIn. De passage à Genève, son responsable insiste sur ses fonctions caritatives. Dont l’éradication de la polio
John Hewko, secrétaire général de Rotary International
Fondé en 1905 à Chicago, le Rotary est l’ancêtre de LinkedIn. Les activités philanthropiques en plus. Cette organisation située, selon son responsable «à la croisée des activités de réseautage et de défenses des causes [ ndlr: humanitaires ] », compte 1,2 millions de membres, dont sept sur dix hors des Etats-Unis. En Suisse, les 213 clubs Rotary regroupent 13 000 membres. Ancien associé de Baker MacKenzie – le plus grand réseau de cabinets d’avocats au monde, où il a dirigé les bureaux de Moscou, Kiev ou Prague au moment de la chute du Mur – puis passé par l’administration Bush pour diriger la Millenium Challenge Corporation, John Hewko est le secrétaire général de Rotary International. 800 personnes travaillent sous ses ordres pour gérer l’organisation, dont 600 au siège de Chicago et 50 au sein de l’antenne de Zurich qui chapeaute l’Europe et l’Afrique. L’Américain était lundi de passage à Genève à l’invitation du World Economic Forum.
– L’Afrique vient de fêter sa première année sans poliomyélite. L’éradication de cette maladie infantile est depuis trente ans la principale cause du Rotary. Ce combat est-il derrière vous?
– Eradiquer signifie continuer la vaccination trois ans après que le dernier cas ait disparu. Or aujourd’hui la maladie est encore endémique dans deux pays: le Pakistan et l’Afghanistan. Si tout se passe bien nous espérons pouvoir annoncer officiellement l’éradication en 2018 ou 2019. Autour de ce projet lancé en 1985 par le Rotary – à l’époque une seule maladie, la variole, avait été éradiquée – nous avons réuni l’OMS, l’Unicef et le Center for Disease Control and Prevention (CDC) en 1988; avant d’être rejoints par la fondation Gates, il y a sept ans. Au total, cette alliance aura dépensé 11 milliards de dollars depuis le début du combat pour l’éradication. C’est à mon sens la plus grande réussite obtenue par un partenariat entre le privé et les services publics. En 1995 on comptait 355 000 cas par an dans 135 pays.
– Le nom de Rotary rime avec Trente Glorieuse, nouvelle classe moyenne. A l’heure de réseaux sociaux professionnels, LinkedIn en tête, n’êtes-vous pas définitivement dépassé?
– Nous ne faisons pas la même chose. Outre le réseautage, nous permettons à nos membres de socialiser et de s’investir dans des activités au service de leur communauté. Bien sûr, nous faisons face à des défis en Europe. Et aux Etats-Unis le nombre de nos membres a atteint un plateau en 1980, avant de se stabiliser autour de 350 000 personnes. Mais aujourd’hui des pays comme Taiwan, la Corée du Sud, le Brésil ou l’Inde représente nos plus importants foyers de croissance. Dans tous ces pays, le développement de la classe moyenne et de l’accumulation de richesses est accompagné d’une prise de conscience quant à la nécessité de rendre d’une façon ou d’une autre ce dont on a bénéficié. Nous connaissions le même phénomène en Occident dans les années 50 et 60.
– Mais comment assurer l’avenir du Rotary à l’heure des réseaux sociaux?
– En Amérique du Nord, où tant de possibilités existent désormais en termes de réseaux professionnels, nous avons démarré des «e-clubs» en ligne. Et nous travaillons à la constitution de nouveau partenariats.
– Vous participez à une réunion du World Economic Forum à Genève jusqu’à mercredi soir. Quel en est l’objet?
– Le Forum réunit les dirigeants d’une douzaine des plus importantes ONG pour des sessions de réflexions sur la façon dont les milieux d’affaires peuvent être encore mieux mis à contribution sur des projets sociaux, environnementaux ou de santé publique. Nous allons apporter notre témoignage. Avec un budget dépassant 2 milliards de dollars par an – soit trouvés et dépensés au niveau local, soit fournis par notre fondation basée à Chicago qui lève 250 millions par an, soit liés au projet d’éradication polio – nous sommes l’une des plus importantes ONG au monde. (TDG)